L’ascension du Huayna Potosí pour un débutant en alpinisme

Si vous passez à côté de La Paz en Bolivie, vous entendrez sûrement parler du fameux Huayna Potosí. Un sommet de la cordillère Royale réputé pour être l’un des 6 000 mètres le plus accessible au monde. Avec un guide chevronné à vos côtés, pas besoin d’une quelconque expérience en alpinisme pour tenter l’aventure. Vous pensez que c’est dans la poche ? Pourtant, plus de 50 % des participants à cette ascension abandonnent avant le sommet. Sans être exigeante techniquement, cette expérience en haute altitude demande un effort physique important et un moral d’acier. 

Quelle compagnie choisir ? Comment gérer le mal de l’altitude ? Dans cet article, je vous partage mon expérience et toutes les informations utiles pour vous aider à réussir votre premier 6 000 mètres.

les montagnes de la cordillère royale

Avec 220 kilomètres de sommets recouverts de neiges éternelles, des lacs au bleu turquoise et des villages Aymaras, la cordillère Royale est un vrai bijou naturel. Pas étonnant que les Espagnols soient restés bouche bée en arrivant devant cette merveille. 

À l’est de la ville de La Paz et au sud-est du lac Titicaca, elle est intégrée à la cordillère Orientale, elle-même une partie de la cordillère des Andes. Sur l’un des versants, la végétation humide des Yungas et ses routes sinueuses, sur l’autre, les larges étendues de l’Altiplano. 

Mais ce qui la rend aussi populaire auprès des grimpeurs, des montagnards et des alpinistes du monde entier, ce sont ses 6 sommets qui culminent à plus de 6 000 mètres d’altitude :

  • le Pico del Norte (6 070 mm) ;
  • l’Illampu (6 368 m) ;
  • l’Ancohuma (6 427 m) ;
  • le Chachacomani (6 074 m) ;
  • le Huayna Potosí (6 088 m) ;
  • le Nevado Illimani (6 462 m).

 Un terrain de jeux presque inépuisable pour les amoureux de sports outdoor et les passionnés d’ascension. 

Attention : le Huayna Potosí est ma première expérience en alpinisme. Mes conseils s’adressent aux débutants et pas aux alpinistes expérimentés. Le but est de regrouper le maximum d’informations possible pour vous aider à gravir votre premier 6 000 mètres. Pour des questions plus techniques, référez-vous aux guides locaux et aux agences de voyages en Bolivie.
Informations pratiques : l’ascension du Huayna Potosí

Quelle est la difficulté du Huayna Potosí ?

9/10

Le Huayna Potosí à la réputation d’être un des 6 000 mètres les plus accessibles au monde. Ne vous laissez pas berner pour autant par cette appellation. Oui c’est un sommet que l’on peut gravir sans aucune expérience en alpinisme (avec un guide de montagne bien sûr). Ce n’est pas pour autant qu’il est facile. Au contraire, l’ascension est difficile. Elle demande une très bonne condition physique, une adaptation à l’altitude et surtout un moral en béton. Pour vous donner une idée, 50 % des personnes qui tentent l’aventure abandonnent avant d’arriver au sommet.

Mais ne vous découragez pas. Si vous pratiquez un sport régulièrement (trail, randonnée, course à pied, etc.) et que vous choisissez une bonne agence avec des guides professionnels, ce n’est pas insurmontable. 

Quand tenter l’ascension du Huayna Potosí ?

Comme pour descendre l’iconique route de la mort, la saison idéale pour arpenter le Massif de la Cordillera Real est l’hiver (d’avril à novembre) pendant la période sèche. Bien que les températures soient plus fraîches (jusqu’à – 20° en haute montagne) et les journées plus courtes, vous aurez aussi beaucoup moins de pluie et un ciel plus clair. 

Comment réussir l’ascension du Huayna Potosí 

Je vais peut-être vous décevoir, mais il n’existe pas de formule magique qui permette de garantir le succès de votre ascension. 

Par contre, quelques actions simples peuvent augmenter drastiquement vos chances d’arriver au sommet :

  • Passez plusieurs jours à La Paz et marchez régulièrement pour habituer votre corps à l’altitude avant le jour J.
  • Favorisez l’ascension en 3 jours plutôt que deux (si vous avez le temps et le budget)
  • Évitez l’alcool la veille de l’ascension (et toutes autres substances festives)
  • Hydratez-vous suffisamment 
  • Prévoyez des feuilles de coca pour vous aider avec le mal de l’altitude et la fatigue

Vous pouvez aussi attaquer le trek el Choro à proximité de La Paz. Il est parfait pour s’aclimater à l’altitude.

Gravir le Huayna Potosí est une expérience éprouvante, mais loin d’être impossible. Prenez votre temps, écoutez les conseils de votre guide et surtout, conservez un rythme fixe. (Aidez-vous du bruit des crampons dans la neige ou de votre respiration pour marquer le tempo.)

un glacier du Huayna Potosi
lever de soleil dans les montagnes de Bolivie
apliniste en tenue

Pourquoi faire l’ascension du Huayna Potosí de nuit ? 

Si les agences d’alpinisme font gravir le sommet avant le lever du soleil c’est pour une bonne raison. Durant la nuit, la montagne est en bien meilleur état. Les températures négatives rendent la neige et la glace plus résistantes et donc plus sécuritaires. Le risque d’avalanche est aussi limité. 

Le départ de nuit n’est pas facile. Mais c’est un maigre prix à payer pour profiter du lever de soleil exceptionnel qui vous attend une fois au sommet.

Gérer le mal de l’altitude en alpinisme

Quand on part en haute montagne, on s’expose au mal des montagnes. Il est provoqué par une mauvaise oxygénation du corps dû à la baisse de la pression d’oxygène dans l’air en prenant de l’altitude. Les symptômes peuvent être : 

  • essoufflement ;
  • fatigue ; 
  • nausées et vomissements ;
  • maux de tête ;
  • accélération du rythme cardiaque.

Ces troubles, qui peuvent apparaître à partir de 3 000 mètres d’altitude, ne sont pas à prendre à la légère

Une acclimatation de plusieurs jours et une montée progressive en altitude permettent généralement à l’organisme de prévenir ce genre de symptômes. Évitez aussi l’alcool, le tabac et hydratez-vous bien.

Si le mal persiste, n’hésitez pas à redescendre de quelques centaines de mètres et à vous reposer. 

Une autre méthode efficace consiste à mâcher des feuilles de coca. C’est une pratique très commune chez les locaux qui permet d’oxygéner le cerveau et d’aider à lutter contre la fatigue. Par contre, je vous préviens, le goût n’est franchement pas fou.

sommets de la cordillère royale

Combien de jours pour tenter l’ascension ?

Avec les différentes agences locales d’alpinisme, vous aurez généralement le choix entre faire l’ascension sur deux ou trois jours.

Avec la première option, vous partez le premier jour pour le camp de base situé à 5 200 mètres d’altitude. Vous y passez la nuit avant de commencer l’ascension du sommet du Huayna Potosí vers 1 h le lendemain matin.  

L’option en trois jours ajoute un premier jour d’initiation à l’alpinisme. En plus de se faire la main avec le matériel et quelques techniques, cela permet aussi de passer une première nuit à s’acclimater à l’altitude. 

Je vous conseille vivement la deuxième option si vous en avez le temps, afin de maximiser vos chances d’atteindre le sommet.

Les hébergements pendant votre trek du Huayna Potosí  

Pour ces deux à trois jours d’ascension, vous passerez la nuit dans des abris de montagne. D’abord au camp de base puis au camp d’altitude vers 5 200 mètres. Chaque refuge est très basique et ne comporte que des dortoirs avec des lits superposés, voire des matelas sur le sol. 

Pensez à prévoir un sac de couchage avec une température de confort d’au moins 0 degré.

refuge du huayna potosi

Les différentes voies pour arriver au sommet

Il existe trois voies différentes pour arriver au sommet du Huayna Potosí

La voie traditionnelle 

Si vous êtes débutant et que vous tentez l’ascension avec un guide, vous emprunterez forcément la voie traditionnelle. L’ascension commence au refuge du Huayna Potosí ou à la Casa Blanca. Vous rejoindrez d’abord le Campos Rocas où vous passerez la nuit. Le lendemain, direction le campement Argentin à 5 500, puis le sommet en passant par la pyramide ou par une arête plus vertigineuse. 

La voie des Français

Nommée ainsi pour ses deux premiers escaladeurs français : Alain Mesili et Therry Cardon, cette voie est réservée aux alpinistes chevronnés. Pour cause, vous devrez traverser un mur vertical de près de 200 mètres de haut pendant plus de 5 heures. Une épreuve à la fois technique et physiquement épuisante.

La voie par la face ouest

Cette ascension de haut niveau est considérée comme la voie la plus belle du Huayna Potosí. C’est aussi la plus difficile. Elle combine un dénivelé de plus de 1 000 mètres, des voies mixtes (roche, neige et glace) tout en étant fortement exposée aux risques d’avalanches.

Quelle agence de tourisme choisir ?

Bien choisir son agence est primordial dans ce genre d’expédition. Le sérieux des guides, la qualité de l’équipement et la bonne organisation de l’ascension sont des facteurs de sécurité importants quand on pratique l’alpinisme. Rejoignez des groupes Facebook comme “Les Français en Bolivie” afin de demander des recommandations à d’autres voyageurs qui auraient tenté l’expérience. 

Cela permet d’avoir des informations à jour. 

De mon côté, je suis parti en 2023 avec la compagnie “Eloy guia de alta montaña”. Leur agence est située au 372 rue Sagarnaga à La Paz. Tout s’est super bien déroulé, le matériel était au top et mon guide était adorable et très professionnel. 

Les étapes de l’ascension du Huayna Potosí 

Jour 1 : de La Paz au camp de base

Trajet en bus depuis La Paz jusqu’au camp de base ou un déjeuner vous attend. Vous serez ensuite initié aux différentes techniques d’alpinisme, aux règles de sécurité et à l’équipement.

Jour 2 : du camp de base au camp de haute altitude 

Petite marche avec tout l’équipement sur le dos pour atteindre un des camps de haute altitude (campo Alto Roca, Casa de Guías, refugio Rojo). Une fois au refuge, vous préparerez votre matériel pour le lendemain.

Jour 3 : du camp de haute altitude jusqu’au sommet puis retour

C’est le jour J. Après un levé vers 1 heure du matin, vous chaussez vos crampons et commencez l’ascension. Vous arriverez entre 5h30 et 7 h au sommet pour admirer un lever de soleil d’anthologie sur les montagnes des Andes. Retour au camp de base puis à La Paz. 

Mon expérience : Ascencion du Huayna Potosí

Jour 1 : Initiation à l’alpinisme sur un mur de glace

En quittant La Paz direction le refuge Casa Blanca, j’apprends que le mal des montagnes a eu raison des autres membres de mon groupe. Je serai donc seul avec mon guide de montagne, Andreas, pour les trois prochains jours. 

On approche du camp de base et déjà, les nombreux sommets de la cordillère Royale surgissent à l’horizon : l’Illampu, le Nevado Illimani et finalement le Huayna Potosí.

Cette première journée est une initiation à l’alpinisme. À peine nos sacs posés qu’on part s’entraîner sur un épais mur de glace. L’utilisation des crampons et du piolet s’avère plus compliquée que prévu. La peur du vide, le froid et l’altitude engourdissent mes mouvements. C’est seulement après une troisième tentative que j’atteins enfin le sommet du mur, haletant comme un lévrier en fin de course.

De retour au camp, j’avale tout ce que je peux avant de disparaître dans mon sac de couchage. Dehors, le vent fait grincer les planches de bois du refuge. Je finis par trouver le sommeil.

escalier de pierre
alpiniste sur un mur de glace
passage sur de La Paz

Jour 2 : en route pour le refuge Casa de Guias

2.5 km

D+ 450

Après 1 mois passé en Bolivie, mon corps s’est bien adapté à l’altitude. La petite balade jusqu’au point de vue du lac Zongo ne pose aucune difficulté. Avant de passer à table, je croise les groupes précédents de retour du sommet. Les visages sont marqués par la fatigue. Certains somnolent sur place, allongés dans la neige. 

-C’était comment ? 

-Dur, trèss dur…

En avant pour la prochaine étape. Le poids du sac et l’altitude rendent chaque mouvement pénible. 400 mètres de dénivelé positif et quelques éboulis plus loin, j’arrive au refuge casa de Guias (5 100 m).

Je fais la rencontre d’un Anglais et de deux Iraniennes. On ne tarde pas à se mettre au lit, demain le départ est à 1 H 30. 

cordillère des andes

Jour 3 : L’ascension du Huayna Potosí 

8 km

D+ 850

Dans la nuit, je manque plusieurs fois de m’étouffer dans mon sommeil à cause du manque d’oxygène. Dehors, l’obscurité a englouti la cordillère Royale. Le froid est cinglant. La température annoncée est de -20°. On s’équipe rapidement et nous voila sur la glace. 

Au loin, les lampes frontales des premiers groupes serpentent dans la montagne

Les deux premières heures se font sans trop de difficulté. À part le bruit des crampons dans la neige, c’est un silence total. 

Vers 5 700 mètres, des ralentissements causent un encombrement sur la voie principale.

– Tu veux prendre un raccourci ? Me demande Andreas 

– Carrément ! 

J’aurais dû me méfier… quelques minutes plus tard, me voila devant une pente de glace d’une trentaine de mètres. Trop tard pour reculer. À chaque coup de piolet, je prie pour que la glace supporte mon poids.

vue du sommet du Huayna Potosi
voie classique huyana potosi
lever de soleil bolivie

Nous voilà en contrebas du sommet (5 900). L’altitude devient pesante. Chaque pas s’arrache avec effort immense. Le long de la dernière pente, les abandons se multiplient. Les vomis aussi. Après 1 heure de bataille intensive, le jour commence à se lever. Devant moi, l’épreuve finale : la crête du Polonais.

On emprunte le versant opposé aux autres groupes, une crête assez large pour passer mes deux pieds. Des deux côtés, un vide interminable. Mon corps panique.

Qu’est ce que je fous ici ? Il me faut bien 30 secondes pour réussir à reprendre mon calme. Je plante mon piquet fermement dans un muret de neige à hauteur de genoux et j’avance lentement. J’essaye de chasser l’idée de ma tête qu’au moindre faux pas…. 

Au sommet, le spectacle est grandiose. Les chaînes de montagnes de l’Altiplano se dessinent dans une lueur orangée. La cordillère Royale, La Paz et même le lac Titicaca (à plus de 80 kilomètres) flottent dans une mer de nuage.

moi au sommet du huayna potosi
pente dans les montagnes
un passage de crête étroit

Je reste quelques minutes immobile, paralysé par l’émotion, avant de redescendre de l’autre versant. 

Sur le retour, les paysages traversés se dévoilent un à un – crevasses profondes, rimayes, grottes de glace, arêtes vertigineuses. Encore une aventure qui restera gravée dans ma mémoire. Au refuge du camp de base, les prochains groupes nous regardent d’un air étonné. 

Alors c’était comment ?

Voilà, vous avez désormais toutes les infos nécessaires pour réussir votre premier 6 000 mètres. N’oubliez pas, le plus important est de rester humble, d’avancer à votre rythme et de bien écouter les conseils de votre guide. Pour le reste, c’est au mental que ça va se jouer. 

Rassurez-vous, la récompense est largement à la hauteur de l’effort. 

N’hésitez pas à partager vos retours en commentaire.

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