En VTT sur la route de la mort bolivienne

de Thibault Domas

le 9 février 2025
Tristement surnommée « la route de la mort » à cause d’innombrables accidents, la route des Yungas est désormais prisée des voyageurs en manque de sensations fortes. En seulement 3 heures de VTT, on traverse les hauteurs glaciales de l’Altiplano jusqu’aux profondeurs verdoyantes et humides de la forêt tropicale Bolivienne. Mais avec 3 600 mètres de dénivelé négatif et des virages en épingle sans garde-fou, il vaut mieux garder les yeux ouverts et les mains sur les freins.
Après un voyage d’un mois en Bolivie, je vous livre mon retour de cette folle expérience.

L’histoire de la route la plus dangereuse au monde
Dans cette région du versant ouest de la cordillère des Andes, les reliefs escarpés sont l’ennemi numéro un du génie civil. La « route des Yungas », construite par des prisonniers paraguayens pendant la guerre du Chaco, fut pendant longtemps le seul moyen de relier le col de la Cumbre et le village de Coroico.
Chaque année, cette route à flanc de falaise cumulait des centaines d’accidents meurtriers.
En 1995, la BID (Banque interaméricaine de développement) qualifie ce passage de « route la plus dangereuse au monde ».
En 2006, le gouvernement bolivien met en place une alternative pour limiter les accidents de circulation. Un nouveau tronçon de route goudronnée permet de relier La Paz à la forêt Amazonienne en passant au nord de Cotapata.
Depuis, la vraie route de la mort n’est plus empruntée que par quelques irréductibles locaux et par les touristes en VTT à la recherche d’une bonne dose d’adrénaline.
Descendre la route de la mort en VTT est-il dangereux ?
La réponse est simple : oui.
Les croix sur le bord de la route font office de rappel. Même s’ils sont aujourd’hui moins fréquents, des accidents continuent d’occurir.
Une fois cette réalité prise en compte, faut-il s’abstenir de faire la descente ?
Pas forcément.
Les accidents de cyclistes restent rares et sont souvent dus à un manque d’attention et au non-respect des règles de sécurité.
À l’image d’autres experiences comme l’ascention du Huayna Potosi, la route de la mort demande 100% de votre concentration.
Si vous prenez cette activité avec sérieux, en écoutant bien vos guides et en gardant une vitesse que vous maitrisez, tout devrait bien se passer.
Quel niveau faut-il en VTT pour tenter la route de la mort bolivienne ?
Pas besoin d’être un crack du vélo pour tenter l’aventure. Personnelement, je ne fais que rarement du VTT et c’est passé tout seul.
Il faut quand même être à l’aise avec les virages un peu serrés, la gestion de la vitesse et de la concentration.
Contrairement à ce que l’on peut penser, c’est une activité plutôt physique. La chaleur sous la combinaison une fois descendue dans les Yungas et les vibrations de la route dans les bras pendant 3 heures demande un certain effort.
Quand faire la descente en VTT de la route de la mort ?
Il vaut mieux attendre l’hiver (avril-novembre) qui correspond à la saison sèche. Les températures sont plus fraîches et les risques de grosses averses sont moindres.

Combien coûte la route de la mort avec une agence de tourisme ?
Vous trouverez tous types de prix dans les différentes agences de tourisme de La Paz.
Les moins chers proposent la journée à 35 € alors que d’autres vont monter jusqu’à 70-100 €.
Le prix dépend de l’agence, mais aussi du type de vélo que vous souhaitez. Il en existe trois :
- les vélos à une suspension ;
- les vélos à doubles suspensions ;
- les vélos à freins hydrauliques.
Je vous conseille de partir au moins sur les doubles suspensions pour une question de confort. Le sol est très rocheux sur la route de la mort et une fois à pleine vitesse, ça secoue pas mal. Favorisez une agence sérieuse avec de bons avis clients plutôt qu’une agence pas chère. Bien entendu si vous trouvez les deux, foncez !
Quelle agence choisir ?
On ne le répétera jamais assez, le choix d’une bonne agence est primordial pour ce genre d’activité extrême. Vous ne voulez pas vous retrouver avec un frein qui lâche ou un pneu qui explose en pleine descente. Dans la rue de Sagarnaga à La Paz, vous trouverez un grand nombre d’agences de location (Gravity Yungas, Xtreme Down Hill, Space Biking, etc).
Pour trouver la bonne :
- Demandez des recommandations aux voyageurs que vous rencontrez.
- Posez la question sur le groupe Facebook les Français en Bolivie.
- Prenez bien en compte les avis clients de chaque agence.
- Demandez à tester les vélos en amont.
N’hésitez pas non plus à poser pleins de questions et évitez les compagnies qui font du forcing pour vous vendre leurs services.
Comment profiter en évitant une chute ?
S’il est impossible de prévenir un accident à 100 %, plusieurs réflexes peuvent être pris pour éviter les risques inutiles.
- Restez raisonnable : pas besoin de vouloir doubler la terre entière pour prouver que vous êtes le plus rapide.
- Soyez en forme physiquement : dormez bien la veille et évitez de tenter l’expérience si vous ne vous sentez pas dans votre assiette.
- Faites preuve d’anticipation : freinez avant les virages surtout si la visibilité est mauvaise
- Demeurez vigilant : surtout quand vous traversez des cours d’eau, ou des parties du sentier plus techniques.
- Vérifiez bien votre matériel : VTT, casque, etc.



Itinéraire de la route des Yungas
Pour la première partie, vous partirez du col de La Cumbre qui est aussi le point de départ du trek el Choro.
Après une descente d’une vingtaine de kilomètres sur une route en asphalte, vous rejoindrez le bus qui vous emmènera sur la route de la mort originale : un sentier de terre plus étroit que vous dévalerez en 2 à 4 heures selon la vitesse du groupe.
Une fois arrivé au village de Yolosita, vous aurez le droit à un repas et une petite surprise avant de reprendre le bus jusqu’à La Paz.
Où se loger à La Paz ?
Pour faire cette activité d’une journée, le plus simple est de loger dans la capitale bolivienne.
Vous pouvez vous diriger selon votre budget vers une auberge de jeunesse, un Airbnb ou un hôtel. La Bolivie est un pays bon marché pour un Européen et il est assez facile de trouver un logement dans les grandes villes.
Quelques recommandations :
- The Adventure Brew Hostel : une grande auberge de jeunesse très abordable qui propose sa propre bière
- The Rooftop Hostel Bolivia : un hôtel vraiment pas cher avec une belle vue sur la ville (à deux pas de la gare routière)
- Hôtel Rosario La Paz : maison coloniale pleine de charme avec un super petit déjeuner
L’odeur de l’asphalte au petit matin
Le jour se lève à peine. Une faible lumière recouvre les cimes des montagnes de l’Altiplano autour de La Paz. Après un petit déjeuner en ville, nous arrivons au col de la Cumbre à 4 800 mètres d’altitude.
Un vent cinglant nous force à enfiler rapidement nos équipements (combinaison, genouillères, coudières et casque). Une fois habillé, chacun teste sa monture, en particulier les freins. Pas de place pour la négligeance quand on descend la route de la mort.
Un dernier petit briefing sur la sécurité et nous voila en file indienne derrière notre guide. La pente est raide et offre de bonnes sensations. Pendant 22 kilomètres, on glisse à toute vitesse sur l’asphalte en évitant les quelques véhicules sur notre passage.



Dans la jungle des Yungas : sur la vraie route de la mort
Après une mini pause, on remonte dans le bus pour rejoindre le tronçon de la route originale. La baisse d’altitude nous fait gagner quelques degrés. Le vent froid et sec laisse sa place à une humidité lourde et pesante. Le paysage change aussi. Dans les Yungas tout est plus vert. Comme si les plantes avaient le droit à un traitement de faveur. Plus de béton ou de circulation, juste un étroit sentier de terre à flanc de montagne.
En quittant l’asphalte, les sensations changent complètement. Le terrain, recouvert de boue et de pierres de toutes tailles, impose le rythme. Chaque mouvement de guidon doit être calculé pour ne pas envoyer sa roue dans le décor. Heureusement, les guides nous signalent les virages les plus serrés ou les passages délicats en amont. Les croix en bord de route servent de rappel aux plus entêtés. De nombreuses voitures, bus et camions de marchandise ont fini leurs courses au fond du ravin à quelques centaines de mètres. Des cyclistes aussi… mais très peu. Quelques inconscients qui fonçaient à tombeau ouvert sans réfléchir.
Contrairement aux règles de circulation classiques, sur cette route, c’est celui qui descend qui roule à gauche le long du ravin. Dans les premiers virages, on ne fait pas les marioles. On ralentit histoire de maîtriser un peu l’engin et de bien négocier la trajectoire. Puis on prend confiance, on accélère et on se fait plaisir.



Une lugubre demeure
Malgré les sensations, on regrette presque de ne pas pouvoir profiter plus du paysage. Les vibrations et les obstacles sur le chemin ne laissent pas vraiment de temps pour la contemplation. Pourtant, le cadre est magnifique. La vallée, recouverte d’une épaisse végétation, baigne dans une brume légère.
Au détour d’un virage, on croise l’ancienne demeure de Klaus Barbie. Surnommé le boucher de Lyon, cet ancien nazi-chef de la Gestapo s’est exilé en Amérique du Sud après la Seconde Guerre mondiale. Un détail sinistre pour une route au passé déjà bien lugubre.
Avec la vitesse, chaque seconde demande une attention totale pour bien négocier les trajectoires. Pas question de finir dans le décor, aussi extraordinaire qu’il soit. Nos guides, très bienveillants, s’adaptent au rythme du groupe.
Après 2 h d’une descente effrénée, on arrive en sueur au village de Yolosita. Sur le trajet du retour, la fatigue se fait ressentir. La tête contre la vitre du bus, mes yeux se ferment lentement. Demain je m’accorde un jour de repos. Après tout, je viens de survivre à la route de la mort.

La descente de la route de la mort en vélo est une pure dose d’adrénaline. Elle nécessite néanmoins toute votre attention et un respect sans faille des mesures de sécurité.
Si vous décidez de tenter l’expérience lors de votre voyage en Bolivie, faites-le de la bonne façon.
N’hésitez pas à poser vos questions en commentaire.